Article publié le 31 août 2016.
Projet d’Instruction relatif à l’organisation et fonctionnement des réseaux de contrôle : Observations de la CGT
Le projet d’instruction relatif à l’organisation et au fonctionnement des réseaux de contrôle ne peut recueillir en l’état l’adhésion de la CGT. Il dénote une profonde méconnaissance de la réalité et des finalités du travail d’enquête économique.
Les missions ne sont pas pensées ici comme une priorité mais comme un prétexte. Le projet de revitalisation des réseaux se présente comme un outil de management, aveugle et sourd aux réels besoins des enquêteurs de terrain, connecté aux seules exigences de la DNO. Ce projet a été construit dans une logique « parisienne ». Toutes les exigences des réseaux seront dictées par le haut sans s’appuyer sur un diagnostic des besoins des enquêteurs.
Ce projet aurait pu être un élément recréant du lien « métier » entre l’administration centrale et les agents par une couverture technique dépassant la contrainte imposée par la RéATE, les DD(CS)PP et les DIRECCTE ne constituant qu’un cadre territorial d’exercice de nos missions mais…
Les conditions d’exercice de nos missions doivent correspondre à nos missions et pour cela il faut :
– Des effectifs
– De la souplesse nous permettant de nous adapter aux tissus économiques et rester réactifs
– Un système permettant de développer nos compétences en variant les secteurs et les expertises
Pour la CGT, un réseau est un appui technique, intellectuel, matériel au terrain, un outil d’aide à l’enquête, un lieu d’échanges et de circulation des compétences. Cette conception du partage des connaissances et de l’entraide ne peut reposer que sur une démarche acceptée par les agents et par des relations d’égalité et de solidarité. C’est ce qui pendant des années a servi de ciment. C’est ce que nous avons exprimé de façon non ambigüe aux auditeurs avant qu’ils ne rédigent leur rapport. Ces arguments ont été écartés au profit d’une approche stratégique et managériale. Pour preuve, les réseaux ne concernent pas tout le monde pas plus qu’ils ne concernent toute la chaine d’enquête.
Or, combien d’entre nous ne sont affectés qu’à une seule mission, un seul secteur ?
Qu’en sera-t-il des autres objectifs des agents ? Le projet d’instruction prend soin de protéger le réseau lui-même, mais ses membres qui rendent compte à d’autres encadrements, issus d’autres horizons administratifs et qui pourront avoir leurs propres impératifs, qui s’en soucie ? Il faut protéger les agents juridiquement, tant dans leur travail d’enquête que dans les liens hiérarchiques avec les divers donneurs d’ordre.
Le développement des connaissances nécessite du temps, surtout dans un contexte d’évolution permanente des textes. Miser sur l’expertise c’est aussi renoncer à travailler à la transversalité de manière approfondie. Cette organisation tend à déconnecter les compétences des territoires, elle conduit à considérer que les agents généralistes ont moins besoin de compétences alors que c’est l’inverse : plus le champ est large et plus les agents doivent connaître l’existence des règlementations à défaut de les maîtriser dans l’instant.
Même approche lorsque l’on considère que certains réseaux ne sont que régionaux, ou que leur existence est provisoire. Derrière un affichage de souplesse se cache la pire des rigidités, celle des exigences contextuelles de la DNO et d’un corsetage des plus serré opéré par l’administration centrale. Le projet d’instruction est précis quant à l’impératif de cahier des charges (à l’initiative des bureaux sectoriels) et d’un règlement intérieur pour bien contraindre tout le monde, le tout couplé à une contrainte budgétaire.
On notera dans ce projet une volonté d’un profilage plus important des agents, d’un fléchage des « experts » mais aussi d’une normalisation du travail d’enquête via des audits (version démarche qualité ?).
Loin de redonner à tous du lien, du liant, par la diffusion de notre culture d’enquête, nous allons au contraire lancer un processus d’isolement de problématiques à traiter à part.
Ce fonctionnement, qui entre autres fioritures va jusqu’à prévoir un rapport annuel et une implication de l’IGS pour se prononcer sur la poursuite de la mission du réseau, n’assouplit rien. Il s’inscrit dans la trajectoire d’alourdissement des rapports au sein de l’administration. Or l’alourdissement et la complexité des chaines hiérarchiques est sans cesse dénoncé, et de façon unitaire depuis le début du marasme de la RéATE. Ce fonctionnement en réseau, tel qu’il est défini, ne modifie pas le contexte hiérarchique et le quotidien des agents, il s’y ajoute.
Ce projet ne fait que valider un peu plus l’analyse que fait la CGT du plan Macron dans son ensemble. Il s’agit de l’ensemble le plus mortifère jamais mis en œuvre depuis la RéATE. Il s’agit bel et bien d’aboutir à un changement d’objet de notre administration qui, par le délaissement du travail de terrain, le désinvestissement des tissus économiques locaux, se réoriente progressivement, mais très surement, vers le service de la communication politique via des « expertises ». Il est vrai, cela est nettement moins couteux, tant budgétairement que du point de vue des ambitions.
Après l’attaque du maillage territorial, corseter les réseaux dans une démarche à court terme en les adossant à la seule DNO, c’est porter un coup fatal à nos missions en réduisant le champ, au risque de passer à côté de l’évolution des marchés et donc des besoins.
De plus c’est à nos missions que nos emplois sont adossés. Nous ne sauverons rien en empruntant cette voie.
La CGT exige une remise en cause en profondeur du projet dans son ensemble. Elle dénonce le fait qu’une nécessité aussi criante que la revitalisation des réseaux débouche sur une préoccupation managériale. Ce sont les principes qui sous-tendent ce projet d’instruction qui posent problème et condamnent toute réponse conséquente aux problèmes de notre maison.
La CGT demande que s’ouvre sans tarder un processus de dialogue et de négociation sur les réseaux pour notamment :
– Intégrer l’ensemble des agents dans le processus en permettant à chacun de prendre part au fonctionnement d’au moins un d’entre eux.
– Adopter une définition unique des réseaux pour y intégrer tout le processus d’enquête. Cela nécessite d’une part la prise en compte de tous les secteurs économiques et d’autre part de toute la chaine d’enquête. Des spécificités telles que le contentieux sont aujourd’hui menacées faute d’ETP. Certains directeurs envisagent de les confier à du personnel non spécialisé. Il est urgent de soutenir ces problématiques en recréant les solidarités de terrain que la RéATE continue de détruire.
– Définir les besoins les plus urgents par un audit du terrain et non de façon autoritaire sur la base unique de la DNO.