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Article publié le 16 février 2021.

Lettre ouverte concernant le contrôle des jauges à la Directrice Générale

Votre courriel adressé aux chefs de service (Direccte et DDI) de la CCRF le vendredi 29 janvier intitulé «  ?contribution de la DGCCRF à la mise en œuvre des mesures sanitaires : contrôle des jauges dans les magasins ? ? » ne peut que soulever de notre part de l’inquiétude et de l’incompréhension.
 
Chacun peut entendre que, confronté à une crise d’une ampleur et d’une nature exceptionnelle, l’État veuille mobiliser l’ensemble de ses ressources humaines et matérielles pour y faire face. Les agents de la DGCCRF, avec le sens du service public qui les a toujours caractérisés, font partie de ces ressources. Ce postulat, toute analyse sur les modalités de la gestion de cette crise mise à part, la CGT ne le rejette pas.
 
Dès lors, votre souhait de nous voir contribuer, conformément à la volonté du ministre LEMAIRE, renouvelée lors de notre entrevue du 2 février, à l’effort de solidarité nationale peut être entendu. Pour autant, peut-il être compris dans sa forme actuelle ?? Faut-il qu’une fois de plus notre action au service des citoyens marque un renoncement ??
 
Les services du ministère de l’Économie en général, et ceux de la DGCCRF en particulier, ne peuvent-ils être mis à contribution que sur un mode anecdotique ?? Car c’est là un problème de fond. En quoi le contrôle de jauges se rapporte-t-il à la défense de l’ordre public économique que vous appelez de vos vœux ??

Vous allez pousser à des contrôles de pure forme, comme si les secrétaires généraux de préfectures, qui nous pilotent effectivement depuis cet été, n’allaient pas trouver cela tout seuls. Vous allez une fois de plus mettre vos agents de terrains sous tension pour de la communication. Bien entendu les observations relatives aux jauges peuvent être faites par les agents de la DGCCRF à l’occasion de leurs enquêtes. Noter qu’on ne saurait parler de contrôle au cas d’espèce puisque nous n’avons pas d’habilitation. Mais tant qu’à faire les choses ainsi, un effort d’imagination aurait peut-être pu être consenti. Quelles situations de fait rencontrons-nous dans les entreprises qui touchent des aides publiques ?? Quels sont leurs difficultés réelles, leurs impacts sur l’emploi, leurs attentes ?? Ces questions ne sont-elles pas urgentes ?? N’ont-elles aucun lien avec la crise ??

Ce sont là des informations que les agents de la DGCCRF peuvent recueillir au moins aussi facilement et de façon pas plus bancale que celles relatives aux jauges et qui potentiellement ont bien plus à voir avec leurs compétences et les finalités des administrations de contrôle économique. En fin de compte n’est-ce pas cela aussi la sauvegarde des équilibres économiques entre les acteurs et plus largement la défense d’un ordre public économique ?? Ajoutons que, pour le coup, il s’agirait d’une dimension supplémentaire d’une activité que nous avons déjà, ce qui n’est pas si clair s’agissant des contrôles de jauge.
 
Vos agents y retrouveraient sans doute bien plus le sens de leur engagement que dans la continuelle dilution qu’ils connaissent sur le terrain, dilution à laquelle vous avez cru bon de participer pleinement par votre message. Certes la République du Centre, la Provence, Ouest France et tout ce que pays compte de publications locales survivantes seront peut-être moins friandes du travail de l’ombre lié aux questions économiques. Nous n’épaterons pas la galerie en effectuant sur l’heure plus de 20 contrôles de jauges en un après-midi et tout cela « ?à l’occasion d’autres enquêtes ? » bien entendu (car malheureusement cela s’est vu).
Mais ce n’est pas là l’essentiel. L’essentiel, et peut-être plus encore en période de crise, c’est de s’adapter, mais pour pouvoir jouer son rôle et pas un nouvel épisode de la tragédie de la RéATE.
 
Nous sommes là très loin de nos missions d’ordre public économique. Au cas présent, nous sacrifions notre travail d’enquête par une surcharge de travail et pour une activité à laquelle nous n’apportons aucune plus-value. Cela au mépris de la sécurité juridique des personnels qui ne peuvent décider d’aucune suite à ces « ?contrôles ? ». Il est par ailleurs douteux que les constats effectués puissent être utilisés par d’autres services. Il ne s’agit donc au mieux que d’orienter ces autres services dans leurs propres recherches. Il est vrai qu’en période de chasse il faut des rabatteurs…
 
Nos capacités ont été réduites par la baisse des effectifs, la césure absurde entre région et département, les secrétariats généraux communs et à présent l’interdépartementalité. Nous nous retrouvons désormais, malgré nous, comme des petites mains, bonnes à tout faire. Demain ferons-nous la circulation quand les forces de l’ordre seront occupées à autre chose ?? Sommes-nous un couteau suisse offert aux Préfets et aux encadrements interministériels ?? « ?Pour tout achat d’un kit de gestion de crise, recevez vos six agents de la DGCCRF avec notice offerte… ? ».
 
Sans doute le temps n’est pas celui des polémiques, mais cela n’implique en rien qu’il soit celui de la renonciation à toute politique de service.

Les agents de la DGCCRF n’ont jamais refusé de mettre leurs compétences au service de nos concitoyens, c’est même une préoccupation qu’ils ont réaffirmée sans relâche dans leurs luttes pour la sauvegarde de la DGCCRF et de ses missions. Et vous ??

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