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Article publié le 5 février 2016.

Le rapport sur les services de l’État en charge de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes : de Charbybde en Scylla : Merci Macron !

Le 18 janvier, Emmanuel MACRON, Ministre de l’Économie, de l’Industrie et du Numérique a annoncé la mise en œuvre du rapport MASUREL et AUVIGNE portant sur les services déconcentrés de la DGCCRF.

Le cynisme aura atteint son apogée :

- En 2015, le ministre annonce en CTM qu’il va sortir les agents CCRF des DDI avec pour contrepartie l’inter-départementalité,

 En 2016, il va appliquer les préconisations d’un rapport qui renforce l’inter-ministérialité et… lance l’expérimentation de l’inter-départementalité.

 La question de l’emploi à la DGCCRF est totalement passée sous silence : dommage car elle relève bien des compétences et des responsabilités directes du ministre !

Une nouvelle fois, c’est une arme destruction massive qui est pointée sur le service.

La confirmation de la montée en puissance de l’inter-ministérialité.

La réforme de l’administration territoriale de l’État, dans sa phase développée depuis 2010 et dont les étapes s’enchaînent à vitesse accélérée depuis 2012, percute de plein fouet la DGCCRF comme l’ensemble des administrations.

Dans ce contexte, les annonces du ministre MACRON ne pouvaient que laisser perplexe face à cette obstination à vouloir faire du MECCANO sans en avoir les moyens, présage d’une catastrophe. La réponse n’avait pas tardé de la part du préfet NEVACHE… et aujourd’hui de celle des rapporteurs MASUREL et AUVIGNE qui, non contents d’éclairer les décisions politiques, ont carrément ordonné la mise en œuvre de leurs conclusions et ce dans les meilleurs délais.

Comment imaginer sortir la DGCCRF de la RéATE à l’aide des DIRECCTE qui, elles-mêmes, sont les seules directions de région à être interministérielles, Bercy pesant peu au regard des ministères sociaux.

L’organisation des administrations d’État dans les territoires relève ainsi de la seule décision du premier ministre (avec le SGG aux manettes) et, pour les travaux pratiques, de l’autorité renforcée des préfets (et du ministère de l’Intérieur). Tout ceci ne laisse que peu de place aux autres ministères qui se font désormais rappeler à l’ordre par des haut fonctionnaires qui veillent à l’orthodoxie dans la mise en œuvre des réformes, notamment la charte de gestion qui ne signifie rien d’autre que la future mise à l’écart des administrations centrales en matière de gestion des personnels.

En six ans, les annonces et contre-annonces se sont accumulées. Loin de régler la situation catastrophique dans laquelle le service public et les personnels sont plongés, ces épisodes auront maintenu les agents dans une incertitude permanente de plus en plus mal vécue.

La parole politique a encore une fois perdu en crédibilité !

Les constats figurant au rapport sont dans la droite ligne de ce qui avait déjà été pointé et en grande partie partagés.

La technique est désormais bien connue tant elle aura été exploitée avec constance au cours de cette législature. Elle consiste en l’exposé de constats qui pour partie semblent aller dans le bon sens (peut-on encore sourire de l’affirmation des bienfaits des synergies matérielles en occultant notamment le désastre informatique) et en la prise de mesurettes plus en formes de consolation que de solution.

Mais au bout du processus à la prise de mesures concrètes qui, loin de s’émanciper du marasme des RGPP et RéATE, en accélère les effets dévastateurs tant sur les missions, que sur les personnels et les structures.

Afin que chacun puisse se faire son propre avis sur la situation qui s’annonce, la CGT a décidé de décortiquer le rapport et d’apporter ses propres éclairages (cf le tableau récapitulatif). Il ne s’agit donc pas de faire de la contestation de principe mais de mesurer à la fois les risques et les orientations politiques que sous-tendent les préconisations du rapport afin d’y mettre en face, de manière concrète, des propositions et revendications visant la réhabilitation d’une administration de contrôle économique.

Un désastre pour les missions et leurs conditions d’exercice ! Un désastre pour les personnels !

Tout d’abord, le rôle et la place de l’administration centrale de la DGCCRF n’auront pas été évoqués précisément, confirmant en cela que l’organisation des services n’est plus pensée dans un ensemble administratif cohérent. Or, aujourd’hui c’est au quotidien que les agents mesurent le fossé qui les sépare des lieux de décision et de programmation.

Le SCL est également le grand absent de la réflexion générale. Pourtant nul ne peut contester l’interaction entre les services déconcentrés et les laboratoires, ces derniers participant directement à la mise en œuvre des missions.

Pour les services déconcentrés, voici qu’en plus de conserver une organisation inadaptée à l’exercice des missions de la DGCCRF (en DDPP, DDCSPP, DIRECCT), les préconisations du rapport approfondissent encore plus la démarche interministérielle au détriment du service public et des personnels avec :

 Une cohérence entre les missions qui n’est pas restaurée,. La mission concurrence reste en région. Les appellations mises en exergue par les rapporteurs (« Concurrence, Consommation  » dans la dénomination même des DIRECCTE et « Consommation et Répression des fraudes  » pour identifiant dans les DDI) sonnent bizarrement à l’oreille des agents les plus anciens qui ont vécu une fusion en 1986 entre la direction générale de la concurrence et de la consommation et la direction de la consommation et de la répression des fraudes. Après des années à rappeler que la « commande publique » est partie intégrante de la mission « concurrence  », pourquoi cette dernière est-elle interdite en département ?

- Le refus de traiter de la question de l’emploi dans une administration qui ne peut plus assurer ses missions dans les territoires et qui perd ses qualifications et sa visibilité,qui par asphyxie oblige à une déspécialisation des agents obligés de développer une polyvalence qui permet de moins en moins d’approfondir certains contrôles.

- Une nouvelle contraction du maillage territorial et des impacts en matière d’habilitation.

- Le lien avec l’administration centrale non consolidé, l’IP, voir l’agent A dans un premier temps, homme-orchestre non conforté au niveau stratégique. Nous sommes loin du rétablissement de la chaîne de commandement. Pire, l’inter-départementalité avec à la clé des fusions de directions en département ne peut que complexifier encore la chaîne hiérarchique dans sa composante préfectorale (deux préfets de département ainsi qu’un préfet de région aux commandes).

- Aucune avancée en matière de formation.

Déjà soumis à la double peine d’une RéATE qui se poursuit laminant les droits et les garanties collectives, menaçant le statut particulier ; les personnels vont devoir au surplus composer avec les conséquences du rapport :

L’émergence de nouvelles règles de gestion qui permettrait une affectation initiale basée sur des profils et connaîtraient ensuite un prolongement dans le système de mutation. C’est un coup inadmissible porté à l’égalité entre les agents et à la gestion des carrières. Un tel système dénature le tableau de mutation et remet en cause le rôle des CAP.

Augmentation des distances qui induit une modification des conditions de travail.
Et toujours dans un contexte de « modularité  » qui permet des organisations diverses et qui réduit volontairement une vision globale de la situation des personnels dans leur corps d’appartenance.

Encore une fois, il est demandé aux agents et aux organisations syndicales de s’en remettre à un nouveau plan d’action de la DG. Mais à ce stade, aucune disposition concrète n’est mise sur la table. Pourtant, certaines préconisations sont également lourdes de conséquences :

Une annonce non documentée de réécriture du décret relatif aux DIRECCTE.

Deux expérimentations de fusions de directions départementales devraient démarrer rapidement. Or rien ne filtre, que cela concerne les départements en question (et nous ne doutons pas que certains se placent déjà sur les rangs pour jouer aux apprentis sorciers et étendre leur maigre pouvoir), la cadrage des organisations ou la saisie des instances concernées par les modifications des conditions de travail des personnels (l’expérience récente de la fusion des régions augure mal d’une transparence en la matière pas plus que d’une implication soutenue de la direction générale).

L’impact de la « refonte » du périmètre CCRF sur les autres composantes des DD(CS)PP, notamment s’agissant des problématiques de fusion de directions départementales. Encore une fois la DGCCRF sert de laboratoire à la réforme des administrations territoriales de l’État.

Dans ce dossier l’État poursuit dans la voie du sabordage des politiques publiques et des services chargés de leur mise en œuvre. Pour y parvenir il applique, avec constance, des règles immuables : une surdité totale à toute forme de contestation et le dévoiement d’un dialogue social qui ne débouche, dans le meilleur des cas, que sur les pauvres mesures disposées dans le rapport en guise de paravent ou sur un simulacre de revalorisation indemnitaire (ou du plan de qualification comme préconisé par certains) comme pour le précédent plan d’inaction.

La CGT tient à rappeler qu’outre la sortie de la RéATE, elle a formulé dans son mémorandum des revendications portant notamment sur :

 L’évolution des missions et de leurs conditions d’exercice
 Les moyens humains et matériels dévolus à la DGCCRF
 Les laboratoires de la DGCCRF
 Les droits et les garanties collectives des personnels.
 Les conditions de travail des personnels

Force est de constater qu’aucun de ces points essentiels ne connaît d’évolution significative, excepté dans un sens fortement défavorable.

Dans le dernier rapport commandé par les ministres, le constat est fait une nouvelle fois de l’échec de l’inclusion de la DGCCRF dans les structures de la RéATE. Le gouvernement doit en tirer les conclusions, sauf à saborder délibérément une administration de contrôle économique, la seule à intervenir dans la protection économique des consommateurs.

Dans l’intérêt de la DGCCRF, de ses missions, de ses personnels et des usagers, la CGT continuera à exiger la sortie de toute la RéATE et la reconstruction d’une administration de portée nationale, de plein exercice, exerçant ses compétences en tout lieu du territoire.

Ce combat ne doit pas être abandonné, parce que les batailles à mener doivent être à la hauteur de l’enjeu du service public et des attentes des agents. En conséquence, la CGT a décidé de proposer qu’une démarche intersyndicale soit menée sur les questions de l’emploi et, dans la mesure du possible, des conditions d’exercice des missions (y compris les structures administratives), des droits et garanties collectives des personnels.

Ces réformes s’inscrivent dans un mouvement d’ensemble de casse des services publics et de leurs missions. Le SNACCRF s’est mis au travail avec les autres syndicats CGT de la fonction publique pour organiser, au delà de la DGCCRF, la défense des métiers de contrôle et des garanties d’exercice qui s’y attachent.

Nous appelons au soutien de ces démarches, au maintien et à l’intensification de l’ensemble des formes de mobilisation !

- Mesure par mesure, téléchargez notre analyse du Rapport Auvigné-Masurel

 Télécharger le tableau de suivi des mesures issues du rapport Auvigné-Masurel en date du 19 février 2016

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