Article publié le 13 mai 2022.
Le mépris de Macron, de Castex et de son gouvernement pour les agents de la DGCCRF - Compte rendu de l’Audience avec la DG sur le transfert de la mission Sécurité Sanitaire des Aliments du 12 mai 2022
Alors que les agents de la DGCCRF ont très récemment pris en charge de manière professionnelle et avec une implication sans faille les crises liées aux pizzas Buitoni et aux chocolats Ferrero, le premier ministre vient d’annoncer la création d’une police en charge de la sécurité sanitaire des aliments sous l’autorité du ministère de l’Agriculture en transférant des compétences issues de la DGCCRF vers la DGAL. De plus, 60 ETPT seront transférés budgétairement dès le 1er janvier 2023.
Cette décision, qui rappelle dans sa brutalité, l’annonce le 31 décembre 2008 de l’inclusion de la DGCCRF dans le processus néfaste de la RGPP/REATE, apparaît, au détour d’une mesure électoraliste, comme une sanction à l’égard des personnels de la DGCCRF et une remise en cause de leur action.
L’échec de la RGPP/REATE à la DGCCRF
Pour la CGT, cette annonce est aussi la marque de l’échec de l’application de la RGPP/REATE pour la DGCCRF. Rappelons que la DGCCRF avait été incluse dans ce processus de destruction des services publics en raison, justement, de la mise en œuvre de compétences communes avec la DSV relativement à l’hygiène alimentaire. Aujourd’hui, cela n’existe plus.
La création de cette police sanitaire consacre en effet l’échec de l’organisation actuelle, issue de la REATE et le besoin sur fond de scandales à répétition, de redonner un second souffle aux logiques de contrôles tant pour la DGAL que pour la DGCCRF.
La Sécurité Sanitaire des Aliments ne sera pas mieux assurée !
Ce transfert motivé par une simplification administrative s’accompagne d’une baisse de moyens ! La DGAL se voit attribuer 180 ETPT (dont 60 issus de la DGCCRF) pour la prise en charge de cette police unique. Or la DGCCRF consacre 245 ETPT à la mission de Sécurité Sanitaire des Aliments (la DGAL consacre 4 448 ETPT à cette mission, soit 95% du total). La mission subit donc une perte sèche de 65 ETPT. Autrement dit, demain, il y aura moins de contrôles. Le risque de délégation à des acteurs privés d’une partie de ces contrôles est largement accru !
Le périmètre des transferts.
Selon la Directrice Générale qui a réuni les représentants des organisations syndicales le 12 mai, la DGCCRF reste évidemment compétente sur la loyauté et les fraudes.
Voici les missions qui seront transférées : Hygiène, pesticides (sur le versant sanitaire), radioactivité, compléments alimentaires (sur le versant sanitaire), gestion des alertes et les mesures de retrait et rappel en alimentaire, microbiologie, mycotoxines, certificats export. Ce périmètre est très large !
Pour le suivi des additifs et l’alimentation animale, la répartition des tâches est encore à discuter. Le suivi des matériaux au contact devrait rester de la responsabilité de la DGCCRF.
En ce qui concerne les agents qui exercent principalement ces missions, ils peuvent suivre leurs missions à la DGAL, ou changer d’attribution au sein de la DGCCRF. Il n’y aura pas de mobilité géographique imposée. Pour information, dans les services déconcentrés, 31 agents exercent des missions hygiène à plus de 50 % de leur temps de travail (dont 3 à plus de 75%).
La Directrice Générale a aussi indiqué qu’au sein de la centrale, la sous-direction 4 continuera d’exister. Par contre, elle sera réorganisée.
Pour la CGT, dans les départements, ce transfert devra s’accompagner d’une révision en profondeur des processus de contrôle et d’inspection, notamment les CPMM. Il conviendra également de définir les conditions dans lesquelles un service pourra passer la main à l’autre une fois ses propres compétences exercées.
Par ailleurs, il ne faudrait pas que les Préfets et autres Directeurs, alors qu’il leur revient, dans ce champ professionnel comme dans d’autres, de gérer au quotidien la pénurie d’effectifs fassent appel à des agents de la CCRF pour effectuer des missions relevant de la DGAL. En dans d’autres termes, les agents CCRF ne doivent pas être la variable d’ajustement de la structuration de la future police sanitaire.
L’avenir du SCL ?
Les missions transférées s’appuient sur la réalisation d’un nombre important de prélèvements et d’analyses réalisées par le SCL. Si la Directrice Générale a évoqué la possibilité d’une convention entre la DGAL et le SCL, sa pérennité n’est pas acquise, loin s’en faut. Il n’y a pas eu d’annonces d’investissement majeur pour le SCL.
La CGT a déjà fait des propositions pour recentrer la part d’activité CCRF des laboratoires sur d’une part les modes de démonstration des fraudes et d’autre part leur démonstration proprement dite par la pratique des analyses (voici notre memorandum en ligne).
Pour une administration de contrôle et de police économique au service des citoyens !
Pour la CGT, il est temps d’inscrire la DGCCRF dans un projet stratégique plus global et à plus long terme. Celui d’un grand service de contrôle et de police économiques, doté des moyens humains, matériels et structurels propres à répondre aux problématiques économiques et sociales actuelles et à venir, aux besoins de protection des citoyens et plus largement de protection d’une économie inscrite dans les défis qui se posent à elle de progrès sociaux et environnementaux. Cela pourrait se faire aisément, notamment par le développement des coopérations et des synergies avec les directions et les institutions dépendant des ministères économique et financier
Cela veut dire structurer une administration de contrôle et de police économiques et penser les conditions d’exercice des unités déployées dans les départements. Qui peut aujourd’hui penser que les entreprises à la trésorerie chancelante après la crise de la COVID et la guerre en Ukraine, que les pénuries de matériaux et produits alimentaires amenées par cette même crise et aggravées par la guerre ne vont pas demain générer des fraudes ou à tout le moins des problèmes de qualité ? Qui pour analyser les étiquetages, les messages publicitaires, les comptabilités matières, les délais de paiement ? Il faut à présent recruter !
Pour la CGT, le temps de sortir de l’interministérialité viendra tôt ou tard, le plus tôt possible sera le mieux. Nous avons fait des propositions (à lire ici). Le moment de constater l’échec de la REATE est venu.