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Article publié le 30 mars 2017.

Les PED, périmètre des missions de la CCRF et des douanes

Courrier adressé par la fédération des Finances CGT, le SNAD CGT et le SNACCRF CGT ce jour au Ministre de l’Economie et des Finances concernant le périmètre des missions des Douanes et de la CCRF.

Monsieur le Ministre,

Comme vous le savez plusieurs des directions placées sous votre autorité traversent actuellement des processus de restructurations tant des services que des missions qu’elles ont la charge de mettre en œuvre.

Dans un tel contexte, il nous apparaît que le Ministère devrait avoir pour priorité de conforter les Directions et Services dans leurs cœurs de métier et non de prolonger en interne les processus de confusion des genres et de perte d’identité.

Récemment encore, un rapport de la commission des Lois du Sénat relatif au PLF 2017 (Projet de Loi de Finances) a traduit de façon claire une inquiétude sur la politique de protection des consommateurs, montrant que les missions de la DGCCRF ne s’effectuent toujours pas de manière satisfaisante au regard des Politiques Publiques de l’État.

Pourtant, la DGCCRF se voit confier des tâches qui ne relèvent pas de son périmètre de missions. Dans 8 PED (Point d’Entrée Désigné), à savoir les ports de Marseille, du Havre, de Dunkerque, de Bordeaux, de Saint-Nazaire, et les aéroports de Roissy Charles De Gaulle, de Lyon Saint-Exupéry et de Bordeaux Mérignac, les agents de la DGCCRF se trouvent tenus de participer à la chaîne de dédouanement de manière plus conséquente. Ces missions de dédouanement relèvent des prérogatives de la DGDDI.

À l’origine, seul le contrôle de l’application de quelques règlements Européens étaient concernés, essentiellement pour des problèmes d’éléments toxiques présents dans certaines denrées alimentaires, notamment les mycotoxines (fruits secs), les pesticides (fruits et légumes frais) et certains produits transformés ou conditionnés susceptibles de contenir des métaux lourds ou divers polluants (pâtes alimentaires, thé…).

Jusqu’à présent, les agents, pour une immense majorité des lots, ne voient pas les marchandises. Ils effectuent un contrôle documentaire permettant d’établir un Document Commun d’Entrée (DCE) qui, par suite, autorise le dédouanement proprement dit par la DGDDI. Pour une minorité de lot (les pourcentages imposés varient selon les règlements concernés) des prélèvements sont effectués.

La situation s’aggrave. De quelques règlements donnant une tâche supplémentaire, elle a évolué vers une avalanche de nouveaux règlements qui aujourd’hui menace d’asphyxie les directions concernées. Il a notamment fallu prendre en charge la gomme de guar, le riz OGM, les produits importés du Japon suite à l’incident Nucléaire (toujours en vigueur), la mélamine.

Pour finir, un nouveau règlement sur les produits "bio" doit entrer en vigueur pour ce mois d’avril. Ce sont des milliers de lots qui sont concernés, pour lesquels la direction générale de la CCRF se dit incapable d’évaluer la charge de travail supplémentaire. De plus, elle réalise au dernier moment que les services ne sont pas prêts (manque du logiciel adapté, problème de son fonctionnement connu depuis longtemps et non réglé, absence de formation des personnels et surtout effectif constant).

Ce qu’il faut entendre, c’est que ce travail supplémentaire a une nature particulière. Il est conditionné aux arrivées de navires ou d’avions. Ces flux ne sont pas prévisibles. Notre service doit s’y adapter en sachant que le traitement des déclarations se fait sous l’assurance d’un délai (5 jours en moyenne mais à pondérer selon les règlements et la nature des produits). Ils peuvent donc entraîner brutalement des surcharges de travail et bouleverser totalement les emplois du temps des responsables de sa mise en œuvre. Et c’est là que la mécanique se grippe. Les agents de la DGCCRF chargés de cette tâche, ont, par ailleurs, à effectuer les missions portant sur la Loyauté, la Sécurité, la Concurrence et la Protection Économique des consommateurs. Ils sont tenus par des objectifs, ont une programmation de contrôles parfois contraignante du point de vue des délais, des procédures et des contenus (notamment pour les Contrôles de Première Mise sur le Marché pour lesquels la France rend des comptes aux autorités Européennes).

A titre d’exemple, en Seine-Maritime, ce sont maintenant 11 agents sur 13 qui sont impactés à différents degrés. Certains ont effectué jusqu’à 80% de leur temps de travail aux tâches liées à l’import depuis le 1er janvier 2017 tout en restant chargés de leurs missions respectives. Or, le règlement sur le contrôle des produits biologiques ne les impacte pas encore. Pour faire bonne mesure, il faut porter un éclairage sur les conditions d’exercice de cette tâche. La DGCCRF est absente physiquement du PED du Havre. Il faut parcourir 70 km de Rouen au port du Havre, 140Km aller-retour, cela plusieurs fois par semaine, pour plusieurs agents et plusieurs véhicules, afin d’envoyer les prélèvements au SCL (Service Commun des Laboratoires) de Montpellier ou de Massy, laboratoires également impactés sans apport d’effectif ! Et pendant ce temps les transitaires attendent et les agents s’épuisent. Et que dire du sort des personnels affectés à cette tâche sur le site de Roissy ?

Le refus obstiné de l’Aviation Civile à leur délivrer les autorisations nécessaires à pénétrer dans les aires d’activité, les conduit à devoir quotidiennement être fouillés et passés au détecteur de métaux. Des dépositaires de l’autorité publique, en mission de service public et placés sous votre autorité, se retrouvent une à plusieurs fois par jour en chaussettes dans un entrepôt sous douane de l’aéroport uniquement pour assurer leurs fonctions. C’est tout simplement inadmissible !

Tout cela se produit alors même que la DGCCRF a pour vocation première le contrôle des produits au stade de leur mise sur le marché et jusqu’au consommateur final. Or, nous sommes ici bien avant ce processus puisque, non encore dédouanés, ces produits ne sont pas juridiquement sur le marché intérieur. La DGCCRF n’a pas à intervenir à ce stade et à plus forte raison au détriment de ses propres missions.

Pendant ce temps, la Douane connaît elle aussi de grosses restructurations entraînant notamment des fermetures d’implantation et des diminutions d’effectifs.

Il est tout à fait paradoxal que d’un côté, une direction reconnue comme en difficulté dans l’exercice de ses missions, la DGCCRF, se voit attribuer une activité qui devrait revenir à une autre, la DGDDI. Ce phénomène n’aboutit qu’à la pénalisation des deux structures.

Rappelons que le motif invoqué, l’expertise sur la nature des produits concernés, ne résiste en aucune façon à l’analyse, ces prélèvements ne requérant aucune technicité particulière. Seul le SCL donne un avis scientifique pertinent sur ces derniers. Rien ne justifie donc la pérennisation de cette situation.

D’ailleurs, nous appelons à nouveau votre attention, Monsieur le Ministre, sur la situation du SCL. Démontrant de façon superbe la totale inefficience de sa « tutelle », la DGCCRF a indiqué qu’elle ne disposait d’aucune visibilité sur la capacité du SCL à faire face au surcroît de prélèvements générés par les nouvelles exigences réglementaires. Or, il est douteux que le SCL soit en mesure de faire face à ce nouveau flux. La recherche de résidus de pesticides se ferait aux laboratoires de Massy et Montpellier. Or, le site de Massy est en travaux pour presque un an et les problèmes de déménagement à répétition du matériel, d’empoussièrement, de vibrations, ajoutés à la fatigue latente des agents (conditions de travail difficiles : restrictions dans les locaux, bruit…) risquent de limiter sa capacité.

À notre connaissance, ces deux SCL ne sont pas préparés, tant au niveau technique qu’humain, à une augmentation du nombre de prélèvements.

Monsieur le Ministre, la CGT en appelle à votre arbitrage pour mettre fin à ce qui relève d’un bricolage d’amateur. La mise à la charge de la DGCCRF d’une tâche supplémentaire, à effectifs et moyens constants, est insupportable du point de vue d’un exercice efficace de ses missions.

Bercy a la responsabilité de mettre en oeuvre le périmètre des missions de chaque administration. Dans les deux cas cela doit appeler, et de manière urgente, pour la direction destinatrice un abondement en personnels et en moyens, notamment en termes d’autorisation d’accès aux PED. Les mêmes besoins s’entendent pour le SCL qui doit être mis en position de suivre la demande. Les Ministres doivent arbitrer sur les prérogatives en matière de dédouanement et la mise en oeuvre corrélative de moyens adaptés, donc renforcés, dans l’intérêt des citoyens.

Il est définitivement temps de prendre les mesures pour redonner de la cohérence à notre Ministère du point de vue de l’exercice de ses missions et de donner les moyens nécessaires aux constantes adaptations qu’exige la vie économique. La CGT vous demande de réaffirmer les missions des douanes pour les produits non-encore mis à la consommation et de la CCRF pour ceux mis à la consommation.

Nous sollicitons donc votre bienveillance, Monsieur le Ministre, afin d’obtenir une audience sur ce sujet le plus rapidement possible et vous remercions de l’attention que vous voudrez bien porter à la résolution de l’ensemble de ces éléments et demandes.

Pour la CGT,
Alexandre DERIGNY, secrétaire général de la Fédération des Finances CGT
Brigitte BIDAULT, secrétaire générale du SNACCRF CGT
Manuela DONA, secrétaire générale du SNAD CGT

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