Logo du site

Article publié le 7 mars 2024.

Demande d’audience à M. LEMAIRE sur la situation des missions à la DGDDI, à la DGCCRF et au SCL

Monsieur Le Ministre,

Nous tenions à attirer votre attention sur la situation de la Direction Générale des Douanes et des Droits Indirects (DGDDI), branche Opérations Commerciales, de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF), ainsi que du Service Commun des Laboratoires (SCL), au regard des évolutions stratégiques mises en place dans ces deux adminis trations.

En ce qui concerne la DGDDI, celle-ci continue de subir des transferts massifs de fiscalité vers la DG FIP sans que les transferts déjà effectués n’aient été évalués. La CGT FINANCES vous demande une nouvelle fois un bilan de ces transferts, en terme de contrôles réalisés et de montants de recettes perçues avant et après les transferts pour chaque domaine de fiscalité. Nous souhaitons que ce bilan soit présenté dans une réunion bipartite à Bercy en présence des deux directions.

Parallèlement à ces transferts, la DGDDI a défini des axes stratégiques qui nécessitent la mise en œuvre de nouveaux instruments juridiques.

Elle souhaite élargir le champ des prohibitions pouvant être sanctionnées sur le marché intérieur, via un arrêté d’application de l’article 38-5 du Code des Douanes, afin de contrôler et constater des in fractions aux règles de conformité des produits industriels. Ce cadrage juridique est complété par une doctrine et des procédures de contrôle articulées avec nos partenaires de la surveillance du marché, notamment la DGCCRF, avec laquelle une expérimentation bilatérale est en cours, sur la base d’un protocole signé le 4 juillet 2022.

A ce jour, les organisations syndicales n’ont aucune nouvelle s’agissant de ces évolutions et nous déplorons ce manque de transparence. De même, les douaniers ont plusieurs fois interpellé leur direction générale pour connaître la feuille de route de l’axe stratégique n°7 (sources permettant l’analyse de risque, liste des entrepôts à contrôler sur le territoire, identification et cartographie des cibles) alors que sa mise en œuvre va automatiquement s’exercer et opérer sur le périmètre des missions de la DGCCRF.

L’axe 9 est censé finaliser l’intégration des contributions indirectes et du secteur viti-vinicole au sein
de la douane. Or, nous devons faire face à la volonté affichée de la DGDDI de transférer la gestion des produits aux organismes interprofessionnels sur fond de fermeture de services et de nouvelles suppressions d’emploi. Le contrôle de la qualité des produits viti-vinicole se heurte ici aussi à des problèmes juridiques, les douaniers ne possédant pas le droit d’auditionner les personnes contrôlées dans le cadre de suspicion d’infraction au code de la consommation, contrairement à la CCRF et ses Brigades d’Enquêtes Vins et Spiritueux régionalisées.

L’axe 1, intitulé « optimiser et moderniser le traitement des flux de marchandises aux frontières » consacre la douane comme administration de la frontière. La mission porte sur les contrôles à l’importation nécessaires au dédouanement des marchandises. Avec la mise en place et les suites du BREXIT, la DGDDI a repris la mission de contrôle sanitaire à l’importation alors assurée par la DGCCRF. Après une expérimentation à Dunkerque en 2020, la reprise de mission est intervenue à Marseille et au Havre et s’est généralisée sur l’ensemble du territoire en 2022. Ces transferts se sont fait à effectifs constants et occasionnent une charge de travail, non évaluée suffisamment, dans certains points d’entrées frontaliers. En effet, l’abondement annoncé en effectifs s’est fait à minima sur la base des chiffres transmis par la DGCCRF qui elle-même exerçait depuis de nombreuses années ces missions de manière très dégradée (lieu d’implantation, taux de contrôles physiques) et avec de larges sous-effectifs.

Toujours dans le cadre des suites du Brexit, l’orientation d’un SCL comme prestataire de service ne peut convenir compte tenu des priorités d’analyses sanitaires qui doivent être réalisées de manière urgente et réactive. Un contrat privé avec le HSE de la République d’Irlande (Health Service Execu tive), priorisant les analyses en provenance de ce pays, le manque d’entretien du matériel, les pannes récurrentes et le manque de personnel entraînent une surcharge de travail et des délais incompa tibles avec la finalité potentiellement judiciaire des missions de la CCRF. En effet, pour exemple, les analyses de pesticides sur les produits alimentaires prélevés par la CCRF pointent un retard de 6 mois.

Nous considérons, que le SCL, laboratoire d’État indépendant, doit retrouver son excellence européenne dans ses domaines de compétence, par une politique volontaire de recherche et de développement permettant de répondre aux enjeux de l’évolution technique des produits et des process de fabrication alimentaires et non alimentaires.

Quant à la déclinaison des axes stratégiques (2020-2025) de la DGCCRF, elle cherche à répondre au développement du contrôle et des enquêtes. Compte-tenu des orientations prioritaires sur le numérique, l’économie « verte » et la protection du pouvoir d’achat, et des crises successives dont celles du monde agricole,vous avez déclaré dans votre intervention adressée aux agents que vous veilleriez « à [vous] assurer les moyens nécessaires au bon exercice de vos missions y compris par le rééquilibrage de votre programme d’enquêtes. ». Ceci implique une adaptation des missions de la CCRF.

De fait, des questions interpellent notre syndicat sur ces évolutions alors que la DGCCRF connaît des transferts de missions vers d’autres administrations, le dernier en date étant celui de la sécurité sanitaire alimentaire vers la DGAL, par la création de la Police Sanitaire de l’Alimentation, incluant un transfert d’ETP, alors que cette mission sera externalisée au secteur privé au bout du compte.

De même les contrôles et prélèvements dans le secteur des cosmétiques vient d’être transféré de l’ANSM à la DGCCRF, sans apport d’ETP.

Comment envisager l’avenir et la pérennisation du service public de protection du consommateur et des entreprises par une CCRF avec des secteurs économiques évolutifs, découpée entre les struc tures des DRI et celles des DDI, dont, pour cette dernière, le donneur d’ordre local, la Préfecture en l’occurrence, peut avoir des directives ne correspondant pas aux axes stratégiques et aux orientations ministérielles.

Nous constatons donc un véritable jeu de chaise musicale des missions, entre la DGCCRF et la DGAL, La DGCCRF et la DGDDI, mais aussi entre la DGDDI et la DGFiP.

Une réflexion de fond doit être conduite sur la place de l’État et de ses administrations de service pu blic de contrôle économique, tant au niveau de la production, de l’importation, des transactions et des échanges commerciaux afin de clarifier l’application et la répartition des missions régaliennes, en vue de faire respecter l’ordre public économique, la protection des entreprises et des consommateurs vic times de fraudes mondialisées et/ou nationales.

Aussi, nos syndicats nationaux et notre fédération souhaiteraient rapidement une réunion bilatérale pour faire un point sur ces sujets problématiques et les évolutions potentielles pouvant y répondre.

Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de notre très haute considération.

Alexandre DERIGNY
Secrétaire général
de la fédération des Finances CGT

Manuela DONA
Secrétaire générale du syndicat SNAD CGT

Philippe SIMON
Secrétaire général
du syndicat SNACCRF & SCL CGT

Retour en haut