Article publié le 27 octobre 2014.
Note sur le Supplément Familial de Traitement (SFT)
A l’occasion de la réforme des allocations familiales, la légende des "privilèges" des fonctionnaires est de nouveau utilisée par tous ceux qui ne rêvent que d’affaiblir le rôle de la puissance publique.
Le gouvernement prévoit de baisser les allocations familiales à partir de 6.000 euros de revenus mensuels pour un couple, et remet en cause l’universalité des prestations sociales. Dans ce contexte, la variabilité à la hausse en fonction de la rémunération du supplément familial de traitement de la Fonction publique lui apparaît critiquable.
Sur ce point précis, la CGT juge de même. En 2006 et 2010 le ministère de la Fonction publique a mené deux cycles de discussion avec les syndicats sur une réforme du SFT. A la demande quasi unanime des syndicats, un accord s’était dégagé sur l’architecture d’une réforme du SFT :
– forfaitisation du SFT (fin de la variabilité partielle en fonction du niveau de la rémunération) ;
– introduction d’un SFT pour un seul enfant (il est aujourd’hui de 2,29 euros par mois, et non revalorisé depuis 1967).
Nos références :
– http://www.ugff.cgt.fr/IMG/pdf/CR-ir-sft-03juin2010-declaration-CGT.pdf
– http://www.ugff.cgt.fr/IMG/pdf/SFT-cr-28janv2011-1.pdf
Du projet gouvernemental, les syndicats contestaient uniquement l’alignement du forfait sur le montant minimum du supplément familial de traitement actuel.
En 2011 le gouvernement Fillon a renoncé à mettre en œuvre cette réforme, suite à des désaccords internes au pouvoir sur la pertinence d’une aide dès le premier enfant pour favoriser la natalité.
En décembre 2013 la Fonction publique prévoyait deux réunions de concertation sur le SFT en mai et juin 2014, sans doute pour remettre sur la table le même dossier qu’en 2011, quasiment bouclé à l’époque.
Le supplément familial de traitement est un élément de rémunération, existant depuis 1917, et pas une prestation sociale. A ce titre il est imposable. Les entreprises publiques ont elles aussi un SFT.
Des entreprises privées ont établi un sur-salaire familial dans la première moitié du 20ème siècle. Mais le privé a ensuite fait le choix de développer son action sociale dans le cadre des comités d’entreprise.
L’action sociale en direction des fonctionnaires est faible, voire indigente. Dans l’Etat elle est toutes dépenses confondues de 500 millions d’euros, dont 122 millions en direction de l’enfance. La masse salariale de l’Etat est de 80 milliards d’euros, et le SFT est une dépense de 900 millions.
Le supplément familial de traitement n’est en rien un privilège, c’est une aide ciblée en direction des agents qui en ont besoin, et qui compense partiellement le très grand retard des employeurs publics en terme de politique sociale en direction de leurs agents.
D’autre part de très nombreux agents ont des contraintes de continuité du service public très fortes, horaires en particulier : infirmier-e-s, policier-e-s, personnels pénitentiaires et de justice, etc. Il n’existe quasiment pas de modes de garde collective adaptés à ces situations, pas plus que d’action sociale des employeurs publics y répondant et digne de ce nom. De ce point de vue une comparaison publique-privée doit prendre en compte tous les éléments.
Enfin, le SFT étant un élément de la rémunération, il n’est tout simplement pas question pour la CGT d’accepter une baisse de rémunération, d’autant plus quand le gel du point d’indice est imposé depuis juillet 2010, et prévu jusqu’en 2017 par le gouvernement.
Pour la CGT, dans la situation actuelle, le supplément familial de traitement garde toute sa pertinence, à condition d’être forfaitisé et de prendre en compte le premier enfant.
Argumentaire chiffré et éléments de comparaison :
Montants versés : le SFT est gelé, comme le point d’indice, à sa valeur du 1er juillet 2010.
– Un enfant = 2.29 € mensuel (gelé depuis 1967)
– Deux enfants = de 73.04 € à 110.32 € suivant l’indice
– Trois enfants = de 181.56 € à 280.91 € suivant l’indice
– Par enfant au-delà de trois = de 129.31 à 203.78 suivant l’indice
Le montant minimum concerne toute la catégorie C (ouvriers et employés) et la majorité de la catégorie B (professions intermédiaires, techniciens) : indice 449. En dessous de l’indice 449 on touche le montant minimum.
Le montant maximum concerne les agents de catégorie A : indice 717. Au-dessus de l’indice maximum, on touche le montant maximum - Logique de plancher et de plafond.
Coût total pour les employeurs :
Etat :
900 millions d’euros en 2013, soit 1,1% de la masse salariale.
Le coût de l’ensemble des politiques sociales en direction de l’enfance est de 122 millions d’euros, soit 0,15% de la masse salariale (dépenses ministérielles et interministérielles confondues, crèches et CESU - chèque emploi service universel-, avec participation financière de l’agent dans tous les cas).
Territoriale et hospitalière : pas de données exactes, mais le coût global est du même ordre que celui de l’Etat.
Nature du supplément familial de traitement :
C’est un complément de rémunération, ce n’est pas une prestation sociale, il n’y a pas de cotisations adossées.
Participation aux dépenses familiales
Concerne 40% des fonctionnaires, plus d’un fonctionnaire sur trois. Un fonctionnaire sur 4 est à la fois parent de 2 enfants et plus et perçoit le SFT (un seul SFT par couple de fonctionnaires).
Coût des enfants et SFT (rapport IGAS-CGEFI)
En 2009 après correction des dispositions fiscales (quotient familial) et des prestations familiales, dont les allocations familiales, le coût restant par an des enfants est pour les français, en moyenne (sans le SFT pour les fonctionnaires) :
– Un enfant : 2.536 € le SFT prend en charge 1% du coût restant
– Deux enfants : 3.986 € le SFT prend en charge 24% du coût restant
– Trois enfants : 7.451 le SFT prend en charge 31% du coût restant
Propositions de réforme (à l’unanimité des organisations syndicales de la Fonction publique)
– Établir un montant forfaitaire quelque soit le niveau du salaire.
– Revaloriser le SFT pour un seul enfant, car c’est là que les dépenses sont concentrées, sur le premier enfant et sur le troisième enfant.
Le ministère de la Fonction publique est d’accord sur l’architecture de cette réforme. Il a concerté les organisations syndicales en 2006 et en 2010, mais proposé une réforme budgétairement à minima.