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Article publié le 30 juin 2011.

Thé vert contaminé : Où sont les mesures de protection pour les agents ?

Vendredi 17 juin en fin d’après midi, publication du communiqué de presse de la DGCCRF au sujet de l’interception à Roissy de 162 kg de thé vert irradié en provenance du Japon. Dans le même temps, la direction du personnel informe en temps réel les syndicats de ce communiqué en affirmant que tout est sous contrôle. Serait-ce une tentative de désamorçage de notre réaction suite aux circulaires 5 et 6 publiées sur le sujet ces dernières semaines ?

Toujours est il que ce thé, en provenance de la préfecture de SHIZUOKA, province du centre du pays qui n’était dans la liste des provenances systématiquement surveillées, contient deux fois plus de césium 134 qu’autorisé par les limites imposées par l’UE (1.038 becquerels/kilo, pour une limite fixée à 500 Bq/kg).

Le même jour, Jacques Repussard (X Mines Ponts), directeur de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) depuis 2003, tire les leçons de Fukushima dans un article publié dans le Figaro.

Article étonnamment alarmiste qui indique comme probable la prévision d’un accident grave de type Tchernobyl tous les 10 ans dans la filière. Pour affirmer aussi qu’il faut, par les retours d’expérience, renforcer sensiblement la sécurité du nucléaire.

Ce qu’Henri Proglio, ex-patron de Veolia et patron d’EDF et nouvel homme fort du nucléaire depuis l’éviction d’Anne Lauvergeon d’Areva, affirme dans challenges comme tout à fait possible à condition d’y mettre le prix.

D’où la fixation du prix de cession du MegaWatt par EDF à ses "pseudo-concurrents" à 42€ (contre 32€ que réclamait Gdf Suez et 39€ proposé par le "sage" Paul Champsaur), prix qui permettrait ainsi de dégager les capitaux nécessaires à la sécurité. CQFD.

Rappelons ici que la loi NOME contraint EDF à revendre à ce prix aux nouveaux entrants des volumes importants dans un schéma de concurrence "libre et non faussée" assez novateur : comme la barrière à l’entrée est excessivement dispendieuse (construire un parc éolien, a fortiori une centrale nucléaire coûte "un bras" !), on impose à l’entreprise dominante de céder à prix "tiré" une partie de sa production pour permettre aux opérateurs concurrents de détourner la clientèle EDF avec le produit que ce dernier a été contraint de lui vendre. Epatant !

Imaginons une société de taxi qui devrait mettre à disposition de concurrents (par exemple chinois) un tiers de sa flotte de véhicules à coût marginal pour que ces nouveaux venus puissent s’installer aux bornes d’attente et capter de la clientèle : Ubu roi !

Mais revenons à notre thé vert au césium.

Chronologie et cartographie des risques

14 juin : le prélèvement

Dans le cadre de la TN sur le risque de contamination des produits japonais, nos collègues de Seine saint Denis prélèvent à Roissy le 14 juin le fameux thé vert de la province de Shizuoka.

Les agents disposent des tenues de protection adéquates, et pas seulement des gants de prélèvement pourtant validés, selon la 1ère note de service sur ce sujet, par IRSN.

Les échantillons prélevés sont ensuite remis à un transporteur privé qui les achemine au laboratoire référent (en l’occurrence Lille).

16 juin : le résultat de l’analyse

Les analyses sont effectuées le 16 juin et les résultats attestant de la contamination connus immédiatement.

17 juin : le communiqué de presse de la DGCCRF

Evidemment, pour ne pas alerter les populations, le communiqué de presse est comme toujours strictement factuel et sans consigne particulière de précaution, puisque les produits ont été mis en quarantaine. Pas de risque donc pour les populations.

De nombreuses questions sans réponse

Sur les méthodes de contrôle

Existe t il un protocole, une préconisation, une fiche (PIP ?) de "process" sur la conduite à tenir lors de ces contrôles ?

Les agents disposent bien des tenues appropriées : mais existe-t-il un guide d’utilisation qui fixerait par exemple : comment la porter de manière efficiente, quelles précautions d’usage quand on la porte, qu’en faire à l’issue du prélèvement au cas où la contamination du produit prélevé serait avérée ?

Pas certain du tout !

Les agents ont ils été suffisamment sensibilisés aux risques ? Disposent-ils de tenues en nombre suffisant ? De containers de stockage après utilisation ?

Questions sans réponse !

Sur la traçabilité des prélèvements

Qu’en est-il de la traçabilité du transport de l’échantillon ? Qui y a eu accès ?

Comment se fait il que le colis ait mis 2 jours pour parcourir un Roissy Lille (2 heures par l’autoroute) ?

Serait ce par hasard à cause du choix du tarif de transport le moins onéreux, du fait des réductions de crédit liées à la RGPP ?

Sur la protection des personnels

Une fois la contamination démontrée par l’analyse du laboratoire, quel protocole pour la protection et la sécurité physique des agents ?
Même si l’exposition peut s’avérer bénigne au cas d’espèce, quelle est l’organisation qui prévaut en cas de danger plus important ?

Alors, OUI au retour d’expérience !

NON à une chaîne d’organisation visiblement défaillante et dangereuse !

La CGT avait déjà alerté dans plusieurs circulaires sur le décalage abyssal qu’il peut y avoir en cas de contamination entre la dangerosité des échantillons irradiés et nos méthodes de prélèvement inappropriées en l’espèce. Il faut enfoncer le clou !

1/ Une organisation défaillante, qui n’a pas pris en compte les enjeux de santé publique des personnels.

Où sont les formations des agents, pour qu’ils mettent en œuvre des procédures appropriées garantissant leur intégrité physique immédiate et à terme leur assurant la traçabilité de leur exposition ? Aucune anticipation !

Pourtant, nous aurions pu prendre modèle sur la Douane, laquelle, simplement chargée d’assurer la quarantaine des containers suspects, a mis en place une procédure d’intervention sécurisée.

Qu’on en juge ! Voici l’extrait d’une note de service de la DRDDI du Havre.

"Le plan de formation a été décliné en plusieurs étapes.
Tout d’abord, les agents ont reçu, à compter du 18 avril 2011, de monsieur Reynald Romain, chef d’unité à la BSEC, qualifié PCR, une formation à l’utilisation des premiers matériels livrés par le bureau B2, à savoir deux spectromètres de type PDS 100G-GN.

Ensuite, les agents ont reçu le 3 mai une journée de formation par une société agréée à la radioprotection par l’ASN. Le 4 mai, les agents ont pu s’entretenir avec des représentants de l’ASN sur le site.
Les nouveaux matériels de détection ont été livrés par B2 le 20 mai 2011 (3 Radiagem 2000 et 3 sondes SABG-15+). Les agents ont reçu une formation dispensée par les services spécialisés du SDIS 76 le 30 mai 2011.

Enfin, une formation à la manipulation du Radiagem a été effectuée par monsieur Pierre Drone, qualifié PCR, à compter du 31 mai 2011 pour compléter le niveau de connaissance des agents.

A la suite des informations communiquées par l’IRSN dans le cadre de la cellule interministérielle de crise, nous avons opté, après avoir tenu compte des avis de l’ASN, d’un expert en radioprotection et des services spécialisés du SDIS 76, pour la prise de mesures de sécurité détaillées ci après…..

Les agents doivent disposer des équipements suivants : De gants, D’un masque en dotation D’une combinaison."

Aucun dispositif similaire n’a été prévu à la DGCCRF, alors même que les agents assurent en l’espèce des missions de prélèvement qui présentent plus de risques en termes d’exposition.

Par ailleurs, les services départementaux chargés du contrôle disposent ils de budgets particuliers pour l’achat et l’élimination des protections, ou devront ils tailler dans leur dotation déjà insuffisante ?

2/ Une organisation non professionnelle, qui ressemble à l’improvisation de TEPCO qui arrose à l’eau de mer avec de simples tuyaux de pompier le cœur des réacteurs en fusion.

3/ Une organisation qui tord le cou à la vérité. Le communiqué de presse, sibyllin et factuel, laisse croire au grand public que tout est sous contrôle des services de contrôle, alors même que ces derniers de disposent pas des directives et méthodologies appropriées.

C’est pourquoi le SNA CCRF CGT réclame :

  que l’administration centrale mette en œuvre les dispositifs appropriés de contrôle de la contamination des produits et de protection des agents AVANT prélèvement ;

  qu’elle équipe les personnels des matériels adéquats pour assurer une protection optimale ;

  qu’elle déroge à la chaîne de commandement issue de la RGPP pour rester en prise directe avec les agents CCRF chargés de cette mission ;

  qu’elle mette en place un protocole de suivi individuel des agents ayant réalisé ces missions, pérenne dans le temps et conforme aux préconisations des experts médicaux, pour éviter tout risque futur.

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