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Article publié le 24 décembre 2007.

Lettre des agents de la Direction Nationale d’Enquêtes de Concurrence, Consommation et Répression des Fraudes et des Brigades Interrégionales d’Enquêtes de Concurrence, à M. le Président de la République, Madame la Ministre de l’Economie des Finances et de l’Emploi.

Monsieur le Président de la République, Madame la Ministre de l’Economie des Finances et de l’Emploi,

Les agents de la DNECCRF et des BIEC vous font part de leurs inquiétudes quant au devenir de leurs missions. En effet, un certain nombre de projets de réformes et de réflexions en cours, conduiraient, in fine , à un démantèlement de la DGCCRF : Revue Générale des Politiques Publiques, rapport d’étape de la Commission Attali (création d’une autorité unique de la concurrence, placement des enquêteurs sous l’autorité fonctionnelle du Conseil de la Concurrence), projet OSE, propos des conseillers des ministres et des ministres eux-mêmes et lettre de Bruno Lasserre au Président de la République.

Les agents, sans nier les améliorations qui peuvent toujours être apportées à la défense de l’ordre public économique et à la protection du consommateur, tiennent à rappeler le besoin de renforcer l’ensemble des missions de la DGCCRF ainsi que leur attachement à l’unité et à la cohérence de celles-ci afin d’en garantir l’effectivité.

Des missions complémentaires et garantes d’un marché loyal

Fusionner les deux autorités de concurrence (DGCCRF et Conseil de la Concurrence) constituerait la première étape du démantèlement de la DGCCRF. Or, l’unité de la DGCCRF est parfaitement cohérente, ses trois missions, concurrence, consommation et qualité-sécurité sont complémentaires et indissociables pour veiller à la régulation concurrentielle des marchés et ainsi garantir une protection efficace du consommateur.
De ce fait, la DGCCRF est la seule administration qui assure la protection du consommateur, sous toutes ses formes en France. Son important maillage territorial et ses multiples compétences sont essentiels pour l’efficacité de son travail en particulier pour la défense d’un consommateur ne disposant pas de voies de recours suffisamment rapides et dissuasives.

Un mailllage territorial de proximité et réactif unique en Europe…

La DGCCRF s’appuie sur un maillage unique en Europe au travers d’une organisation du contrôle de la concurrence assurée par des entités administratives complémentaires (Direction Nationale d’Enquêtes, Brigades Interrégionales d’Enquêtes et correspondant concurrence présent dans chaque département) permettant le quadrillage du territoire français et le contrôle de l’activité économique sous toutes ses formes. Nous pensons que la régulation concurrentielle n’est pas un concept abstrait qui peut se traiter depuis Paris, mais qu’il trouve sa légitimité et son efficacité dans la proximité des agents de la DGCCRF avec l’ensemble de l’activité économique du pays au travers de ses missions.

Démanteler ce réseau comporte le risque de priver la lutte contre les pratiques anticoncurrentielles d’un maillage territorial qui participe largement à la détection des dysfonctionnements du marché permettant une large couverture de l’activité économique sur l’ensemble du territoire. Ce réseau est essentiel dans la détection des indices car la recherche d’informations est extrêmement difficile en matière de pratiques anticoncurrentielles : nous n’avons pas d’informateurs officiels et recevons peu de dénonciations, qui ne peuvent constituer le seul déclenchement d’investigations.

L’efficacité de son réseau de contrôle est démontrée en matière de marchés publics : en 2006, 63% du montant des sanctions prononcées par le Conseil de la concurrence concernaient le BTP et le secteur de la construction ((Rapport du Conseil de la Concurrence 2006).
Sa proximité géographique et sa parfaite connaissance du tissu économique constituent les principaux atouts de la DGCCRF et disparaîtraient certainement en cas de fusion avec le Conseil de la concurrence.

…qui a fait ses preuves en concourant efficacement à la lutte anti trust en France

La DGCCRF est un véritable service public de la concurrence. Elle est la seule à traiter de tous types d’affaires, de l’entente entre entreprises du CAC 40 à celle entre boulangers d’un département. En 2006, plus de la moitié des décisions de sanctions rendues par le Conseil de la Concurrence étaient basées sur des saisines ministérielles (V. rapport DGCCRF 2006).

De plus, la saisine de la DGCCRF est parfaitement accessible aux citoyens du fait de sa gratuité, il n’est pas nécessaire de faire appel à des cabinets d’avocats d’affaires pour venir se plaindre d’un concurrent ou demander des conseils.

Enfin, la DGCCRF a développé récemment une panoplie d’outils (micro-PAC, rappel de réglementation) permettant d’appréhender les nombreuses pratiques anticoncurrentielles détectées par ses services qui ne peuvent par nature donner lieu à une saisine du Conseil de la concurrence.

Une collaboration renforcée et efficiente avec le Conseil de la Concurrence

Les deux autorités de la concurrence fonctionnent déjà en étroite collaboration. Celle-ci a été formalisée le 28 janvier 2005 par la signature d’une Charte de collaboration et d’objectifs. La DGCCRF respecte la lettre et l’esprit de cette charte. Le Conseil de la concurrence lorsqu’il confie une enquête à la DGCCRF est informé quasiment en temps réel de l’évolution de l’enquête, des réunions sont régulièrement programmées. Les interactions entre rapporteurs du Conseil et enquêteurs de la DGCCRF existent donc déjà.
Plutôt qu’un climat de compétition ou de défiance, c’est un esprit de partenariat et de collaboration qui doit régner entre les deux autorités de concurrence et les agents de la DGCCRF s’y emploient.
Comme l’a indiqué M. Chatel à l’Assemblée nationale lors du rejet de l’amendement Le Déaut : «  il existe une véritable complémentarité entre le Conseil et la DGCCRF dont l’organisation décentralisée assure un excellent maillage territorial au plus près des réalités économiques locales. » Les enquêteurs sont favorables à approfondir cet partenariat et cette collaboration.

Au final, le système actuel a fait ses preuves. Il est performant et efficace. D’ailleurs, dans une lettre du mardi 20 novembre 2007, dix associations de consommateurs ont fait part de leur opposition au renforcement du pouvoir du Conseil de la concurrence, préconisé par la commission Attali. Selon ces associations, cette mesure entraînerait de facto un affaiblissement du pouvoir de la DGCCRF. Les associations jugent cette proposition potentiellement "extrêmement préjudiciable", et “lourde de conséquences pour la vie quotidienne des citoyens-consommateurs" (V. Challenges.fr -20/11/07)

Pour toutes ces raisons, les agents de la DGCCRF estiment que ces projets sont dangereux pour la défense de l’ordre public économique et la protection des consommateurs.

Ils vous demandent de maintenir l’unité de la DGCCRF et de réaffirmer sa vocation d’administration de contrôle pour l’ensemble de ses missions de concurrence, consommation et de sécurité.

81 signataires

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