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Article publié le 17 mai 2021.

Encadrement dans la fonction publique : La CGT ne confond pas réforme et démantèlement

Ce que l’on appelle « la haute fonction publique » occupe une place non négligeable dans l’actualité de ces derniers temps.

En effet, après les annonces d’Emmanuel Macron sur la suppression de l’ENA, c’est Jean Castex qui y va de ses révélations le 6 mai en promettant la disparition du corps des préfets à brève échéance.

Il n’est pas anecdotique d’observer que, dans les deux cas, le pouvoir exécutif privilégie les déclarations tonitruantes à une quelconque concertation. Pour celles et ceux qui pouvaient en douter, voilà une nouvelle confirmation que Président et Premier ministre ont un penchant énamouré pour le fait du prince et une très faible appétence pour la concertation. La CGT qui, depuis des années, avance des propositions sur ces importants dossiers désapprouve ce qu’il faut bien qualifier de passages en force.

La majorité des organisations syndicales a voté contre le texte et pas une d’elles n’a voté pour !

Ce qualificatif n’est nullement exagéré puisque, lors du Conseil supérieur de la fonction publique de l’État qui examinait le projet d’ordonnance sur la création de l’Institut du service public le 3 mai, le gouvernement a refusé la plupart des amendements. Conséquence : la majorité des organisations syndicales a voté contre le texte et pas une d’elles n’a voté pour !

Que des réformes soient à débattre et à mettre en œuvre, la CGT y est tout à fait favorable.

S’agissant de l’ENA, la suppression de tout classement au sortir de l’école, l’allongement significatif de la scolarité, la mise en place d’une formation substantielle sur la dimension sociale, la création d’une véritable troisième voie large et ouverte constituent quelques exemples de pistes que notre organisation syndicale estime de nature à améliorer les choses.

Sur les préfets et leurs missions, il faut rompre avec une conception qui tend de plus en plus à faire de l’administration préfectorale le bras armé du tout sécuritaire. Il serait opportun de réfléchir à ce que leur tutelle s’émancipe du ministère de l’intérieur pour rejoindre la sphère du Premier ministre.

Les nécessaires évolutions de la fonction publique sont choses sérieuses qui méritent des échanges contradictoires et approfondis.

La suppression annoncée des corps d’inspection fait par ailleurs peser de lourdes menaces sur des missions essentielles de contrôle des administrations.

À l’évidence, pour Emmanuel Macron et le gouvernement, ce débat démocratique n’est pas à l’ordre du jour ; il est même antinomique de sa vision de l’exercice du pouvoir. Au-delà, il ne faut pas s’y tromper : l’ultralibéral président a bel et bien une conception de la Fonction publique.

Le problème, c’est que celle-ci tourne le dos à l’intérêt général et, aux besoins de la population, privilégie les intérêts du marché.

Dans le cas d’espèce, c’est une nouvelle remise en cause de l’indispensable neutralité et indépendance des agent·e·s de la fonction publique dont il est question.

La disparition programmée des corps d’encadrement supérieur n’a rien d’anecdotique même si elle n’impacte a priori que moins de 1 % des effectifs des trois versants.

il y a là une volonté d’avoir des personnels totalement aux ordres du pouvoir politique

En effet, il est indispensable de la relier à d’autres éléments de la politique menée depuis 2017, dont la loi de transformation de la fonction publique est tristement emblématique.

Avec cet outil législatif, le pouvoir exécutif entend accroître de manière exponentielle le recours au non-titulariat, alors que celui-ci représente déjà plus d’un emploi sur cinq.

Si la précarité ainsi développée constitue bien entendu une régression majeure, il y a en filigrane un autre danger particulièrement préoccupant.

Il s’agit ni plus ni moins de la mise à mal du socle progressiste bâti à la Libération, renforcé et rénové au début des années 80, faisant du fonctionnaire régi par un statut la norme de l’emploi dans la Fonction publique.

En étendant la contractualisation et en supprimant des corps, ce qui « est en marche  » pour reprendre un slogan tendancieux, c’est l’extinction progressive du fonctionnaire titulaire hors quelques secteurs baptisés de manière péremptoire et problématique de régaliens.

Des cadres dirigeants, des inspecteurs généraux, des préfets et des sous-préfets nommés de manière discrétionnaire pour « faire fonction  », c’est une attaque contre le principe d’indépendance de l’agent public.

Loin d’être une reconnaissance des qualifications et des compétences, il y a là une volonté d’avoir des personnels totalement aux ordres du pouvoir politique puisque la garantie que confère l’appartenance à un corps n’existera plus.

Point besoin d’être grand clerc pour comprendre que l’exercice du détricotage statutaire ne s’arrêtera pas là : par la porte grande ouverte, ce seront demain d’autres missions publiques – et avec elles, des dizaines voire des centaines de milliers d’emplois – qui seront concernées par ce dispositif régressif.

Et que l’on ne nous parle pas de modernité ! De telles visions rétrogrades avaient déjà cours à la fin des années 70 avec le rapport Longuet, dont le nom n’est pas exactement synonyme d’engagement progressiste…

Sous des formes diverses, y compris parmi les hauts fonctionnaires, des voix s’élèvent chaque jour plus nombreuses contre les projets rétrogrades du gouvernement. La CGT salue ces initiatives.

Promouvoir les services publics, mieux reconnaître les agentes et les agents, favoriser la diversité sociale à tous les niveaux passent par des mesures à rebours de celles imposées par Emmanuel Macron et Jean Castex.

C’est pour ces politiques de progrès social que la CGT continuera de proposer, de s’engager et d’agir.

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